Du jour où le monde fut créé, et jusqu’à ce qu’Israël apparût, le Chabbat était délaissé : personne n’en révélait la sainteté et la bénédiction. Certes, de sa sainteté cachée s’épanchait la bénédiction, en ce que le Chabbat dispensait à l’homme la faculté de comprendre la valeur du travail, et l’importance de se reposer de son labeur. Mais la bénédiction était restreinte ; aussi, l’homme était asservi à la satisfaction de ses besoins, sans ces valeurs divines grâce auxquelles il aurait pu se libérer. Illustration extrême de cela : la nation égyptienne asservit les enfants d’Israël, fit d’eux des esclaves et les contraignit à travailler durement, afin de satisfaire ses besoins et ses convoitises. Cela, jusqu’à ce que l’Éternel nous fît sortir d’Égypte, nous donnât la Torah et le Chabbat et, par cela, nous fît également passer, d’une conception asservissante selon laquelle tout le but de l’homme est d’atteindre le plus possible de biens, d’argent, d’assouvissement de ses appétits, à la liberté.
En d’autres termes, le Chabbat est destiné à établir en nous les valeurs divines qui se sont révélées lors de la sortie d’Égypte ; et, par ce biais, de faire de nous des êtres libres, comme il est dit :
Garde le jour de Chabbat pour le sanctifier… et tu te souviendras que tu fus esclave au pays d’Égypte, et que l’Éternel ton Dieu t’en fit sortir d’une main forte et d’un bras étendu. C’est pourquoi l’Éternel ton Dieu t’a ordonné d’observer le jour du Chabbat (Dt 5, 11-14).
Grâce au Chabbat, le peuple juif se relie à l’idéal suprême, et confère une signification profonde aux six jours de l’action, afin que ceux-ci ne soient pas assujettis à la seule nécessité de survivre et de satisfaire ses besoins, mais que le travail qu’on y fait soit accompli dans la liberté, afin d’élever le monde et de le parachever. Cela, jusqu’à ce que toute l’humanité se libère du joug du travail, qui lui fut imposé à cause de la faute d’Adam, et que le monde revienne à la condition du jardin d’Éden. Aussi est-il obligatoire, pour les gens riches, de garantir également le repos sabbatique à leurs serviteurs et à leurs domestiques, afin que se dévoile la liberté qui est en leur âme.
